Avec une totale assurance, le président Prabowo a affirmé son désaccord avec l’économie néolibérale. Selon lui, les riches adeptes de cette école ne partagent pas leurs richesses avec les classes populaires (23/07/2025).

Sans effet de ruissellement, le niveau d’inégalité en Indonésie, mesuré par l’indice de Gini selon l’Agence centrale des statistiques (BPS) en mars 2025, s’élève à 0,375. Ce qui contredit clairement le mandat constitutionnel stipulant que la nation doit prospérer pour tous ses citoyens.

L’anti-néolibéralisme de Prabowo est une thèse qu’il a maintes fois soulignée, défendue, communiquée, écrite et répétée. Pourtant, elle reste irréalisée en pratique. Pourquoi ? Parce que presque tous les économistes choisis pour son cabinet adhèrent aux principes néolibéraux — avec Sri Mulyani comme figure centrale.

Durant son mandat de ministre des Finances, ses politiques clés tournaient autour des « 6 i » : investissement (étranger), intervention, infiltration, inefficacité, déstabilisation et invasion. Logiquement, ce programme a engendré six conséquences majeures (« 6 d ») : dé-indonésianisation, dé-nationalisation, dé-rationalisation, dé-moralisation, frein à l’innovation technologique et désindustrialisation.

Quelle en est la preuve la plus évidente ? L’Indonésie est rongée par la corruption et la normalisation de celle-ci à tous les niveaux ; nous exportons des matières premières et importons des produits finis.

Les néolibéraux aiment prendre des décisions drastiques qui garantissent un accès inégal à l’éducation, aux soins, au capital, à l’emploi ainsi qu’aux droits juridiques et humains. Parallèlement, nombre de leurs politiques ne favorisent pas les citoyens pauvres, peu éduqués ou en situation de handicap.

Résultat : après plus de 50 ans sous l’emprise d’agences, d’institutions et d’idéologies néolibérales, nos citoyens se divisent en trois catégories : (1) la classe supérieure — corrompue ; (2) la classe moyenne — cynique ; (3) la classe inférieure — perpétuellement mécontente.

Ce phénomène est renforcé par l’émergence d’une société marquée par les « 3 d » : défiance, désordre et désobéissance. Une société de défiance est celle où les citoyens n’ont plus confiance les uns envers les autres ni envers les institutions gouvernementales — alimentée par la corruption, l’injustice juridique, le manque de transparence et une tradition de trahison des élites au pouvoir.

Quant à la société de désordre, elle reflète un chaos systémique — biologique, psychologique ou socio-politique. C’est une perturbation mentale affectant les pensées, émotions et comportements des citoyens, menant à l’anxiété, la dépression, le stress, voire des troubles bipolaires face à l’état désastreux de la nation.

Enfin, la société désobéissante désigne des actes défiant règles, ordres ou normes établies. Les citoyens refusent de suivre instructions et réglementations, voire y résistent. C’est le terreau du chaos et de la révolution.

En somme, nous sommes maudits par un destin marqué par un déficit d’hommes d’État exemplaires, une absence d’intellectuels proposant des solutions et la disparition d’une noblesse vertueuse. Un sombre portrait d’une nation plongeant dans les ténèbres civilisationnelles.

Comment y remédier ? Accélérer l’enseignement de l’identité indonésienne, ancrée dans les valeurs socio-politiques de la Pancasila. Mais attention : construire ce front (à travers sentiments, pensées, paroles, écrits et actions) est un séisme éternel — amer et troublant.

Pourtant, c’est aussi un combat enrichissant car c’est une « voie commune » avec les démunis dans une république s’éloignant de ses promesses constitutionnelles. Bref, c’est une guerre d’intellect que peu osent mener. En cas de victoire, nombreux s’en attribueront le mérite. En cas de défaite, ils riront et applaudiront.

Ainsi, il y aura bien des récits, confessions, doléances et instants de gravité à préserver. Alors, préparez une place dans cette révolution partagée, et laissez le tourbillon danser parmi nous. Car la révolution ne donne rien d’autre qu’elle-même, et ne prend rien qu’à elle-même.